Nous n’avions pas encore pris le temps d’en savoir plus sur les nouvelles formations Design. C’est désormais chose faîte ! Titouan Motreuil est un jeune diplômé en Immersive UX de l’École de Design Nantes Atlantique. Ses projets et sa passion pour les voyages et l’immersion nous ont intrigués ; en même temps, nous revenons d’un tour du monde de l’immersion. Il n’en fallait pas plus pour vouloir en savoir plus !

Comment es-tu devenu Immersive UX Designer ?

T.M : A l’origine j’ai fait un bac STI2D dans un lycée technologique, dans lequel on apprend de l’informatique et de la prog. J’aimais bien la fibre scientifique et technique mais je voulais aussi m’orienter vers un aspect plus créatif. Via une amie j’ai découvert l’école de design de Nantes et c’est comme ça que je me suis dit : pourquoi pas ?!

En quoi consiste ta formation en UX Immersive Design ? 

T.M : En Bachelor, à l’école de Design de Nantes, on a un tronçon qui permet autant de se familiariser avec la culture du design, du dessin, qu’avec des cours de programmation et d’infographie lorsqu’on se spécialise dans un champ précis du design. En master, on se spécialise de nouveau avec l’ajout de cours de gestion, de droit et de comment créer son entreprise de design. J’ai choisi la spécialité Immersive UX parce que ça m’intéressait vraiment de comprendre comment créer de nouvelles interactions avec de nouveaux médias – y compris en réalité virtuelle. Cela va de la création d’un meeting room en réalité virtuelle à la création des supports numériques & interactifs pour aider à la médiation culturelle par exemple.

C’est un master très professionnalisant et en même temps très exploratoire. Il commence par un échange international. Ensuite on navigue entre différents domaines allant du design fiction au design d’interaction, avec beaucoup de création de prototypes. Nous avons aussi de nombreux projets avec des partenaires professionnels. Cela permet rapidement de donner un sens à nos réalisations… Et à la fin, les débouchés sont nombreux : mes amis sont designers d’espaces, artistes graphiques, animateur 3D, etc. 

Un master qui commence par un échange, c’est atypique non ? 

T.M : Oui, clairement ! Mais c’était une excellente chose. L’expérience du voyage, en soi, c’était très riche ! De nombreuses rencontres, l’émerveillement de la découverte, une histoire et une culture extrêmement inspirante, le tout dans un milieu avec des étudiants du monde entier. En échange dans une université au Japon, j’avais des cours avec des interventions de moines bouddhistes ou encore d’ingénieur spécialisées en « greenroof » à Tokyo, ça nous change ! C’était très épanouissant. 

C’est d’ailleurs ce qui m’a largement inspiré pour mon projet de fin d’études. Le thème du voyage s’est imposé, notamment pour faire revivre des patrimoines du passé et faire voyager des participants dans un autre espace-temps, à l’aide de technologies ultra modernes, même dans un lieu très ancien. Mon projet propose un voyage dans le temps où l’on redécouvre d’anciennes reliques du musée de Nantes durant la visite d’un lieu chargé d’histoire : le Château des Ducs de Bretagne.

Forcément donc, ce semestre au Japon m’a marqué et je vois d’ailleurs aujourd’hui le voyage comme une source d’immersion et d’inspiration. Il comprend tout ces éléments qui font qu’une immersion fonctionne : les découvertes, les rencontres et interactions sociales, l’utilisation des nos sens, etc.

On retrouve d’ailleurs cette thématique, et notamment l’empreinte du Japon dans ton projet Hokusai VR !

T.M : Pour un stage en entreprise, j’ai eu la chance d’avoir pratiquement carte blanche pour créer un projet en VR de A à Z. J’ai voulu rendre un hommage aux estampes d’Hokusai. Elles sont en fait très petites mais on peut leur donner un caractère impressionnant en réalité virtuelle et créer une immersion plus forte, notamment en pouvant interagir avec. Surtout, j’y ai ajouté un système de saison et de carte interactive en relief pour étudier le travail d’Hokusai sous différents points de vue. C’était super et j’ai même pu exposer ce travail lors de la Nuit Blanche à Paris.

Tout cela était guidé par le travail effectué durant mon master, après mon voyage à l’étranger. J’ai commencé à m’y intéresser d’autant plus, à tenter de trouver des articles sur le voyage comme source d’immersion. C’est le point de départ de mon mémoire de fin d’études : qu’est-ce qu’une expérience de voyage aujourd’hui ? Et en quoi le tourisme virtuel peut apporter une nouvelle forme de voyage au cœur d’un patrimoine historique ?

La réalité virtuelle permet-elle réellement de se projeter dans le passé ? 

T.M : Je pense que la narration et l’interaction sont importantes pour aider les gens à mieux comprendre le passé car cela recréer un contexte, ils se sentent impliqués. On discutait souvent avec la directrice des projets du château sur l’importance de raconter l’histoire des reliques avec une dimension sociale, le fait de leur donner une nouvelle vie de pouvoir interagir avec, et de raconter leur histoire même aux plus jeunes. Et la réalité virtuelle permet tout cela. Elle attire naturellement des publics par son côté “new-tech” et peut provoquer un effet whaou, d’autant plus qu’encore peu de personnes ont testés ce type de dispositifs auparavant. Et lorsque les contenus sont bons, c’est un sentiment incroyable. 

Et puis surtout, lorsque le patrimoine est détruit, on peut malgré tout le reconstruire, le préserver, virtuellement, pour y vivre en taille réelle, comme si on voyageait dans les archives. C’est une superbe opportunité.

Comment as-tu travaillé pour mettre au point cette expérience ?

T.M : Au départ, il y avait deux axes sur lesquelles travailler. Le premier dont on a déjà parlé, était intimement lié aux reliques. Lorsque le visiteur s’empare d’un objet du musée (par exemple une très vieille épée rouillée), il est transporté dans un courte histoire interactive dans le passé en lien avec cette relique.

Le second était lié au lieu, le château. Nous voulions scénariser la visite virtuelle du château accompagné de Nicolas Machiavel rendant visite à Anne de Bretagne peu de temps avant son sacre. On y aurait découvert les lieux de vies, habités et animés par des personnages emblématiques du château Anne de Bretagne. Mais au final, cette seconde partie était très complexe et nous n’avons pas pu la développer et nous nous sommes concentrés sur le premier axe, plus interactif.

Découvrir Historeum – Credits : Titouan Motreuil

Quels ont été les problèmes majeurs que tu as rencontrés ?

T.M : L’installation du matériel ! Je voulais que la scénographie immerge déjà le visiteur avant même de mettre le casque. Mais c’est très dur de placer des dispositifs aussi lourds dans des salles du château qui n’ont pas été prévu pour cela. Que ce soit en termes d’hygiène, de place, ou encore de gestion du flux des visiteurs durant le parcours de visite classique du lieu, c’est une vraie problématique. 

L’installation pour Historeum – Credits : Titouan Motreil

Mais il y a aussi de belles opportunités ! Par exemple, la lumière du soleil abîme les reliques, elles sont donc en intérieur. En réalité virtuelle, cela ne pose aucun problème de mettre virtuellement ces reliques dans la cour du château, sous une verrière spacieuse en plein  soleil. J’avais même créé une affiche publicitaire : « brise la vitrine, et empare toi des reliques » pour donner au visiteur l’envie de s’en saisir et d’en faire comme bon lui semble avec, et surtout de pouvoir voyager dans le temps et vivre ce petit arc narratif avec les reliques en main. 

La fameuse affiche ! – Credits : Titouan Motreuil

Des derniers projets à partager ?

T.M : Il y a eu plusieurs projets qui m’ont marqué et qui sont disponibles en ligne sur mon portfolio. 

Je pense notamment à CHAOS. Une expérience en réalité virtuelle thérapeutique pour mettre en lumière le stress dans la vie quotidienne ; notamment à l’adolescence ou les choix importants semblent infinis. L’utilisateur est donc mis face à des dilemmes complexes à résoudre, et doit y répondre rapidement. L’atmosphère très oppressante. Cela débouche ensuite sur un recul de la situation avec un avatar qui prend le rôle d’un spécialiste permettant de débriefer les actions effectuées et à terme d’apprendre à gérer son stress ainsi qu’à prendre des décisions en ayant plus de confiance en soi. C’était vraiment top d’autant plus qu’à l’origine nous discutions avec une personne qui fait des recherches sur les syndromes post-traumatiques dans l’armée. 

CHAOS – Credits : Titouan Motreuil

Il y a eu aussi un projet pour les Utopiales de Nantes qui se rapprochait du design fiction. Nous avions reproduit une vue incroyable sur la ville de Nantes. On peut y voir un beau paysage, avec un chat qui vient souvent nous voir et qu’il faut nourrir. Et puis, projeté 100 ans plus tard, l’eau a recouvert la ville, et c’est un choc ! Cela amène à se plonger dans un futur pas si lointain qui montre l’évolution d’un paysage urbain et donc d‘une société.

Le projet qui aujourd’hui te faire dire que l’immersif à un avenir ?

T.M : Mon projet de fin d’étude et mon projet de stage. Le premier fait voyager dans le temps au sein même d’un lieu de patrimoine. Ils redéfinissent la visite des musées et la manière dont on consomme les arts picturaux. Ils sont mes manières de montrer l’intérêt que peut avoir l’immersion lorsque l’on veut augmenter ces découvertes culturelles. C’est une sorte de voyage dans le voyage. Le but n’est pas de remplacer la médiation culturelle et les musées tels qu’ils le sont aujourd’hui. Ils proposent de nouvelles expériences.

Les lieux historiques et œuvres artistiques ont tant de choses à nous raconter. La réalité virtuelle est un support incroyable. Elle peut faire vivre des aventures ou pour créer des zones exclusives à l’apprentissage de nos patrimoines passés. Je pense aussi aux écoles qui pourraient exploiter cela. Elles enseigneraient à des élèves avec des moyens bien plus marquants. Lorsque j’ai exposé mon prototype du projet Hokusai VR, j’ai été agréablement surpris par l’engouement des personnes de tous âges. S’émerveiller devant une estampe virtuelle et interagir avec pour en découvrir plus.
C’est là que je me suis dit, oui ça fonctionne !

Merci à Titouan ! C’était un plaisir de découvrir ses travaux et sa passion pour l’immersion par le voyage ! Si vous souhaitez découvrir plus en détail et en images ses projets via son portfolio, vous pouvez cliquer ici ! 

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